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CCSI-Info janvier 2013

Publié le 18 janvier, 2013 dans

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bulletin d’infos

janvier 2013

Édito

L’année 2012 s’est terminée sur un constat que nous ne connaissons que trop bien : les inégalités entre Suisses et étrangers persistent à plusieurs niveaux. Deux éléments sont venus, à la fin de l’année, étayer ce que nous savions déjà empiriquement. D’une part, l’Office fédéral de la statistique1 a publié les premiers résultats d’une recherche, mandatée par le Conseil fédéral, visant à créer un système d’indicateurs statistiques de l’intégration des étrangers en Suisse. De l’autre, une étude2, portant quant à elle sur les personnes âgées issues de la migration, est parue sous l’égide de la Commission fédérale sur les questions de migrations (CFM).

 

Dans les deux cas, on constate que dans les domaines de la formation, des soins, des salaires ou encore du logement, les étrangers sont moins bien lotis que les Suisses, et ce de manière significative. À la retraite, les inégalités qui avaient cours dans la vie active tendent à se poursuivre – voire à s’aggraver – notamment en termes de revenus et de santé. Plus inquiétant encore, la situation des personnes étrangères qui sont nées en Suisse est elle aussi moins bonne que celle des nationaux, ce qui indique de graves lacunes dans notre système : même en étant nées ici, ayant été scolarisées en Suisse, et en ayant vécu ici toute leur vie, les personnes de nationalité étrangère sont défavorisées. À titre d’exemple, parmi la population née en Suisse, 7.4% des Suisse-sse-s ont des difficultés à finir le mois, alors que cette proportion grimpe à 25.5% chez les étrangers-ères. Parmi les personnes âgées également, si celles qui sont arrivées récemment connaissent évidemment les plus grandes difficultés, celles qui sont en Suisse de longue date et ont été naturalisées s’en sortent toujours moins bien que les Suisse-sse-s.

Les résultats de ces études illustrent bien les défis qui nous attendent dans le domaine de l’intégration. En effet, si l’aboutissement du processus d’intégration est l’égalité des chances, nous en sommes encore loin. À ce jour, ce qui a été mis en place ne fonctionne clairement pas de manière satisfaisante, puisque même les personnes qui ont, en théorie du moins, eu accès aux mêmes ressources dès la naissance, subissent encore des disparités considérables. L’égalité, en droits et en faits, entre les toutes les personnes qui vivent en Suisse, d’où qu’elles viennent, est au cœur de toutes les luttes menées par le CCSI depuis sa création. Nous savons que le chemin sera encore long, mais sommes convaincues du fait que ces luttes valent la peine d’être menées – pour les personnes migrantes, mais aussi pour la société qui les accueille. Toute l’équipe du CCSI se réjouit donc déjà de repartir au combat, et, tout en vous remerciant de votre précieux soutien, se joint à moi pour vous souhaiter une année très belle et solidaire année 2013!

Marianne Halle

 

Apprentissage ouvert aux jeunes sans-papiers

Le premier février 2013 entrera enfin en vigueur la modification légale qui découle de l’acceptation par les Chambres fédérales, en 2010, de la motion Barthassat. Cette dernière, rappelons-le, visait à permettre aux jeunes sans statut légal d’entamer une formation professionnelle en mode dual. Jusqu’à aujourd’hui, une telle formation leur était interdite, puisqu’elle supposait l’existence d’un permis de travail. Le CCSI s’était beaucoup engagé dans la lutte pour rendre la formation professionnelle accessible à ces jeunes, et avait notamment contribué, lors de la phase de consultation, à deux prises de position en faveur du changement de l’Ordonnance proposé par le Conseil fédéral.

Dans sa version définitive, la traduction en termes légaux de la motion Barthassat prend en compte deux des demandes faites pas les organisations de défense des personnes sans statut légal. D’une part, les jeunes auront une année pour déposer une demande de permis pour apprentissage après la fin de la scolarité obligatoire. Dans la version initiale, la demande devait être déposée immédiatement après la fin de l’école, ce qui, au vu des difficultés rencontrées par de nombreux jeunes pour trouver une place d’apprentissage, aurait fortement limité les possibilités. D’autre part, les cursus de transition et autres classes passerelles sont désormais considérées comme faisant partie de la scolarité obligatoire, ce qui reflète bien mieux la réalité des parcours de la plupart des jeunes aujourd’hui. Ces deux améliorations sont donc à saluer.

Toutefois, le problème majeur demeure, à notre sens, le fait que malgré les conditions très strictes posées pour l’obtention d’un permis pour apprentissage, ce dernier demeure une simple possibilité et non un droit. Ainsi, tout porte à croire que les cantons qui s’étaient opposés à cette ouverture continuent d’appliquer une politique des plus restrictives en la matière. Les inégalités de traitement entre les cantons que nous constatons dans la pratique relative aux cas de rigueur se reportera ainsi, selon toute vraisemblance, sur les apprentissages.

Asile, mesures urgentes: le peuple votera

Malgré les délais très courts, la période de l’année peu favorable, et un sujet difficile à expliquer au public, les organisations et personnes engagées dans ce combat ont réussi à récolter près de 70’000 signatures, soit bien plus qu’il n’en fallait, pour faire aboutir le référendum contre les mesures urgentes dans le domaine du droit d’asile. Il s’agit là d’une victoire d’étape, mais d’une victoire considérable tout de même : en récoltant autant de signatures dans ce contexte difficile, les référendaires ont démontré qu’une partie de la population n’est pas dupe, et refuse l’engrenage des durcissements successifs. Cette partie de la population est minoritaire, nous le savons. Mais elle existe, et doit être entendue, elle aussi. Nous remercions celles et ceux qui ont renvoyé leur signature à Stopexclusion d’avoir contribué à faire entendre cette voix.

Désormais, la bataille se reporte sur le vote populaire, qui aura vraisemblablement lieu en juin, ainsi que sur les autres volets de la révision de la loi sur l’asile encore en discussion au Parlement. À ce jour, la décision de combattre ou non la suite de la révision par voie référendaire n’a pas été prise, mais semble improbable. Par contre, dans ces mêmes milieux, les discussions se poursuivent également autour de l’éventuel lancement d’une initiative en faveur des droits des personnes migrantes. Ce faisant, nos milieux pourraient peut-être sortir de la trop fréquente réaction défensive, et se montrer capables de formuler des propositions concrètes et constructives dans le domaine des migrations.

 

Regroupement familial :

la discrimination contre les Suisses

est maintenue !

Le Tribunal fédéral a rendu un arrêt dont les conclusions vont probablement en surprendre plus d’un-e. En effet, cet arrêt juge acceptable qu’une discrimination persiste entre les citoyen-ne-s suisses et celles et ceux de l’Union européenne en ce qui concerne le regroupement familial. Que des discriminations existent envers les étrangers-ères, nous en avons malheureusement l’habitude. Ce qui est moins courant, c’est que ce soient les Suisse-sse-s qui en soient les victimes.

Petit rappel des faits : un citoyen suisse, appelons-le Monsieur X, dépose une demande de regroupement familial en faveur de sa mère, ressortissante de Bosnie-Herzégovine. La mère est âgée et en mauvaise santé, et n’a plus les moyens de vivre seule. Cette demande est refusée par le Service de la population du canton de Vaud, et la décision confirmée par le tribunal cantonal. Monsieur X fait alors appel de cette décision auprès du Tribunal fédéral, en invoquant notamment une violation de l’article 14 de la Convention européenne des droits de l’Homme (CEDH). S’il invoque cet article, c’est parce qu’il s’agit bien d’une discrimination : si Monsieur X avait été par exemple de nationalité allemande, et non suisse, la Suisse n’aurait eu d’autre choix que d’accéder à sa demande, pour autant que les conditions financières usuelles aient été remplies (voir à ce propos la fiche n° 156 de l’ODAE).

Cette discrimination « à rebours », qui voit les citoyen-ne-s de l’UE bénéficier de conditions de regroupement familial plus favorables que les Suisse-sse-s, est connue depuis de nombreuses années. Elle a même fait l’objet d’une initiative parlementaire, qui visait précisément à mettre fin à cet état de fait en proposant une modification de la Loi sur les étrangers. Cette dernière ayant été rejetée en septembre 2011, la question devait être tranchée par les tribunaux. Or dans cet arrêt, loin de remédier à la situation, le Tribunal fédéral a considéré entre autres que l’inégalité de traitement fondée sur la nationalité – même lorsqu’elle défavorise les citoyen-ne-s suisses – peut être acceptée lorsque des raisons « particulièrement impérieuses » l’exigent. Selon lui, la volonté de la Suisse de pratiquer une politique migratoire restrictive constitue un « intérêt public important et digne de protection », et justifie la persistance de cette discrimination. Face à cette argumentation pour le moins incongrue, un recours sera déposé à la Cour européenne des droits de l’Homme, qui devra se prononcer à son tour sur ce cas emblématique.

Un autre cas helvétique dans lequel l’inégalité de traitement entre citoyen-ne-s européen-ne-s et suisses est à l’ordre du jour est actuellement en cours d’examen par la même Cour européenne des droits de l’Homme. C’est pourquoi nous avons choisi de porter ce cas, défendu cette fois par le CCSI, à votre connaissance en encartant dans ce numéro la fiche que l’ODAE-romand a décidé de lui consacrer. Bonne lecture!

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Festival Black Movie

Du 18 au 27 janvier prochain, le festival de cinéma d’auteur Black Movie s’entiche d’une méduse pour batifoler dans les eaux fraîches du cinéma d’auteur international. Le festival ouvre la saison culturelle 2013 façon pêche miraculeuse : dans ses filets grouillent opus rares et films mutants.

Cette année, faufilez-vous dans un bestiaire d’un autre monde, au travers :

  • d’un focus sur le cinéma portugais contemporain ;

  • d’un cycle sur le cinéma russe indépendant ;

  • de l’épidémie de fièvre jaune transmise par les cinéastes coréens, japonais et chinois préférés ;

  • des passions latines dévorantes pour les perles mexicaines, chiliennes et uruguayennes du cinéma.

 Plongez dans le progamme sur www.blackmovie.ch

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D’ici et d’ailleurs

 Le samedi 26 janvier prochain, Le Courrier organise une journée centrée sur la diversité, sous le titre « D’ici et d’ailleurs » (voir le flyer). Entre projections de films, ateliers pour enfants, débats publics et concerts, le programme, s’annonce particulièrement riche.

À l’occasion de cette journée, le CCSI tiendra un stand d’information et présentera une nouvelle fois au public l’exposition « 20 ans du droit à l’éducation pour les enfants sans-papiers – Impasses et espoirs ». Nous espérons vous y voir nombreuses et nombreux.

dissidente.

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Le CCSI invite chaleureusement toutes et tous ses membres à prendre part à son

Assemblée générale,

le 21 mars 2013.

En attendant la convocation formelle ainsi que l’ordre du jour détaillé, qui vous parviendront ultérieurement, nous vous prions de réserver d’ores et déjà la date, et nous nous réjouissons de vous y rencontrer.

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Le début de l’année, c’est aussi le moment de faire ses comptes. Selon l’adage « ce qui est fait n’est plus à faire », nous avons encarté un bulletin de versement dans ce numéro du CCSI-info : n’hésitez pas à vous en servir, pour payer votre cotisation annuelle (membres individuels : 60.- ; membres collectifs : 150.-) ou pour faire un don au CCSI !

D’avance, un immense merci pour votre précieux soutien.

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1Pour plus d’informations, voir le site: www.statistique.admin.ch

2Hungerbühler, H., et Bisegger, C., « ”Alors nous sommes restés…Les migrantes et les migrants âgés en Suisse », Commission fédérale pour les questions de migration et Forum national « Âge et migration », Décembre 2012. L’étude est assortie d’une série de recommandations, disponibles sur le site de la CFM.