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CCSI-Info septembre 2015

Publié le 23 septembre, 2015 dans ,

bulletin d’infos | septembre 2015 (pdf)

Édito | Marie Houriet

Au vu du rythme galopant de l’actualité, cet éditorial (dont vous lisez la troisième mouture) est selon toute vraisemblance voué à l’obsolescence programmée.

Alors que l’été est LA saison pour s’affranchir des frontières et fouler le sable des bords de mer, 2015 a tendu un miroir déformant à ce temps de vacances. À nos photos de voyage s’ajouteront les images de barbelés, de naufrages, de camions-cercueils, de gares bondées, de convois pris d’assaut.

Entre la première version de cet éditorial à la fin août et celle-ci, les politiques européennes se sont infléchies. Puis durcies à nouveau. Le paradoxe demeure : alors que la ligne tenue jusqu’à l’été était celle d’une Europe devant se protéger d’un

trop-plein d’immigration, c’est précisément l’afflux massif de personnes en quête de refuge qui a entraîné le revirement de début septembre. Le courant médiatique dominant a évolué de manière spectaculaire. Évacué, le point de vue de pays envahis d’étrangers et d’étrangères, menacés par les abus de toute sorte. Basculement au profit de l’empathie ! Envolés, les soupçons d’angélisme envers celles et ceux qui ont toujours défendu cette approche. Les questions s’ancrent sur du concret : comment s’organiser ?

Sacré retournement, surgissant d’une photo plutôt que des dizaines qui l’ont précédée – autant dire, de nulle part. D’une accumulation d’émotions qui se déversent d’un coup dans la balance, modifiant le centre de gravité des perceptions. Sacré retournement, qui n’empêchera pas dans les hautes sphères d’âpres négociations et des manoeuvres politiciennes… À l’heure de boucler ce numéro, de nouveaux tours de vis se profilent.

Les milieux de défense des migrant-e-s et des réfugié-e-s ont de quoi être surpris, perplexes, prudents, réjouis, inquiets. Les dirigeant-e-s (et pas tous !) ont sauté bien tard dans le train de la compassion, courant derrière leur opinion publique plutôt que la précédant. Le progrès, ce n’est peut-être pas ainsi que nous l’imaginions.

Nous aimerions une prise de conscience basée sur quelque chose de moins volatile qu’un soulèvement de coeur. Nous aspirons à un projet de société, à un monde basé sur une nouvelle répartition (non pas des exilée-e-s qu’on cherche à se refiler comme des colis encombrants, mais des ressources ).

Les choses ne se déroulent pas ainsi. Elles suivent rarement une logique rationnelle, prévisible. L’Histoire s’écrit dans le désordre plutôt que sur des autoroutes. Le CCSI a toujours eu à coeur de défendre une approche globale, collective, basée sur l’obtention de droits. Mais 40 ans de lutte nous rappellent que les avancées se font le plus souvent après de longues traversées en zone grise. Qu’elles sont fragmentaires, rognées, fragiles.

Nous devons mettre notre énergie à déployer nos actions dans la réalité telle qu’elle est plutôt qu’à nous focaliser sur ce qui ne correspond pas à notre idéal. L’éclaircie de septembre est bourrée de défauts : opportuniste, tardive, chaotique, incohérente, sans doute éphémère. Ça n’empêche pas que des milliers de personnes ont fait ou vont faire l’expérience d’une autre posture à propos de la migration, de la solidarité avec les exilé-e-s. Même modeste, le changement commence là. Autant que l’intégration des nouveaux venus, cet élan nécessite un puissant effort d’accompagnement.


Bureau de l’Intégration : Regard sur le chemin parcouru

Cet été, les parcs genevois ont vu fleurir des parterres d’un nouveau type. Sous l’impulsion du Bureau de l’Intégration des Etrangers (BIE), quatre d’entre eux ont accueilli des cours de français en plein air. Gratuits, sans inscription ni présence obligatoire mais avec garde proposée pour les enfants : la carte de la souplesse a été jouée au maximum pour cette formule venue combler le creux de l’offre en juillet/août. Avec succès : de 40 participant-e-s par cours au démarrage, la moyenne est montée à 120, et l’équipe est passée de deux à six enseignantes. Si cet article s’ouvre sur ce projet, c’est qu’il est emblématique de l’approche du BIE et de son actuel délégué, Nicolas Roguet. Or pour quelques numéros, votre bulletin va se pencher sur le dossier de l’intégration, avec un accent particulier sur le BIE, sa genèse, sa philosophie, quelques chantiers en cours. Démarrage en douceur, avec un survol.

Petit rappel. En 2001 aboutissait un projet de longue date du CCSI et de MondialContact : Genève se dotait d’une Loi sur l’Intégration des Étrangers (LIE). Le signal politique était fort : l’État reconnaissait que la promotion de l’intégration relevait de ses tâches, et était prêt à assumer ce rôle. Dans la foulée, le Bureau de l’Intégration des Étrangers ouvrait ses portes en 2002. Selon le CCSI, les chantiers prioritaires en matière

d’intégration étaient alors :

– l’accueil des nouveaux arrivants;

– la formation de l’administration;

– la prévention du racisme et le soutien aux victimes de discrimination;

– l’affirmation d’une vision de Genève comme terre de refuge et d’immigration, et la volonté politique de bâtir une société multiculturelle;

– la recherche de solutions pour les migrant-e-s sans statut légal (à la fois pour les permis de séjour et dans des domaines sectoriels tels que l’accès à l’éducation, la santé, la culture);

– la prise en compte de la dimension genre dans l’analyse des phénomènes migratoires.

Après plus d’une décennie, où en est-on ? En 2002, tout était à inventer. Depuis, le BIE a connu quatre adresses et cinq délégué-e-s. Propulsé coordinateur et bailleur de fonds dans un domaine aux acteurs très nombreux, le BIE faisait – et fait toujours – face à un immense défi. En matière d’intégration, les attentes des migrant-e-s, des associations, du public, des institutions, du politique ne peuvent être qu’infinies et partir dans des directions très diverses. S’il reste beaucoup de pain sur la planche, il est intéressant de passer en revue les domaines où le BIE a pu ‘avancer des pions’.

Le BIE fait office de relais à la Confédération pour la répartition de fonds nationaux dévolus à l’intégration. Dans ce contexte, il a élaboré un Programme d’Intégration Cantonal sur 4 ans dressant une liste d’objectifs et de mesures (voir www. ge.ch/integration/programme-dintegrationcantonal). Il ne s’agit pas à proprement parler d’une feuille de route gouvernementale – on n’y définit pas, par exemple, le type de société multiculturelle imaginée. En revanche, il fixe un programme, pose un cadre (avec caps et priorités) aux multiples initiatives. Y figurent également quelques incontournables de la politique d’intégration telle que définie au niveau fédéral, comme l’apprentissage d’une langue nationale ou l’amélioration de “l’employabilité”.

Que trouve-t-on dans cet inventaire ? Promotion et développement de l’offre en matière d’intégration et de cours de langue, élaboration de documentation multilingue, information collective et personnalisée : le dispositif d’accueil a indéniablement fait un bond en avant. Dorénavant, les 20 à 25’000 personnes qui arrivent chaque année dans le Canton (80% de nationalité étrangère) reçoivent une lettre de

bienvenue dans leur langue, une invitation à une séance collective d’information ainsi qu’une carte des guichets de l’administration. Toujours en plusieurs langues, la brochure Bienvenue à Genève

ainsi que des informations ciblées sur la santé, l’emploi, les cours de langue d’origine, les services juridiques, etc. L’interprétariat communautaire est soutenu et fait l’objet de promotion régulière auprès de partenaires ciblés – DIP, HUG… Seul bémol dans cet arsenal aux yeux du CCSI, le contrat d’accueil désormais inclus dans la procédure de demande de permis.

En matière de formation de l’administration, les avancées sont plus modestes mais réelles : conseils et expertises destinés aux communes, institutions ou services; thématisation de l’interculturalité lors des nouvelles entrées en fonction; modules spécifiques dans certains secteurs (police, hôpital). Pour le personnel en place, l’offre se limite encore à des propositions de formation continue. En

parallèle, un travail de fond a lieu avec plusieurs services afin de développer des pratiques intégratives. Ainsi, le BIE a étroitement collaboré avec le service des naturalisations pour définir une procédure qui puisse à la fois satisfaire les exigences de la loi, soutenir les candidat-e-s puis saluer dignement leur naturalisation – l’officielle prestation de serment à la salle Pitoëff se voulant à la fois solennelle et festive.

En ce qui concerne la lutte contre la discrimination, celle-ci s’articule sur deux pôles : d’une part au travers de l’annuelle Semaine contre le racisme, d’autre part via la mise sur pied d’un Centre d’Écoute Contre le Racisme apportant un appui personnalisé aux victimes.

Dans la gamme de l’intégration sociale, le BIE finance une vaste gamme de projets ponctuels, généralement portés par des tiers : collectivités, associations de migrant-e-s, groupements de particuliers, Maisons de Quartier, clubs, ONG… Ce qui ne l’empêche pas de mener lui-même certains projets (et d’asseoir par la même occasion sa visibilité), à l’instar de la campagne J’ai 8 ans je vote dans ma commune.

D’autres mesures ciblent des catégories précises de population (enfants d’âge préscolaire, personnes au bénéfice d’une admission provisoire ou d’un permis B réfugié-e, femmes,…).

En 2005, conformément à la loi, a eu lieu une première évaluation de la LIE[1]. Plusieurs propositions ont été suivies, tant concernant le dispositif institutionnel que les actions menées. Ainsi, le Programme d’Intégration Cantonal répond à la recommandation d’adopter un plan d’action avec des objectifs mesurables, dans un but de cohérence et de coordination. Le rapport invitait également à définir l’implication des partenaires dans des projets précis. Même si d’autres formes auraient pu être choisies pour ce faire, on peut voir la signature de contrats de prestations comme une façon de répondre à cette exigence (du moins pour les organismes subventionnés). Le groupe d’expert-e-s suggérait aussi d’instaurer un monitoring avec observation et évaluation de l’intégration à Genève : une piste qui garde toute sa pertinence.

[1] Cattacin, Sandro et alii (2005). Évaluation de la Loi sur l’intégration des étrangers du Canton de Genève.


Journée de réflexion | Précarisation/austérité en Europe et migration

Le Centre de Contact Suisses-Immigrés organise une matinée de réflexion et d’échanges

le samedi 10 octobre 2015 de 9h00 à 12h30

Maison des Associations, rue des Savoises 15, salle Maathai

Toute personne intéressée est chaleureusement invitée à participer ! Entrée libre.
L’après-midi aura lieu un moment d’échange réservé aux membres du Centre de Contact.

Programme (pdf à télécharger)

Dès 9h00: Accueil

9h30: Présentation de la journée | Viviane Gonik, co-présidente du CCSI

9h40-10h10: Du fordisme au néolibéralisme | Bernard Clerc, membre de Solidarités

10h10-10h45: Les enjeux de l’immigration intra-européenne | Paula Gonzalez Saez, membre de Marea Granate – Collectif international des émigrant-e-s espagnoles

10h45-11h15: Pause

11h15-11h45: Précarisation du séjour des migrant-e-s en Suisse | Christophe Tafelmacher, avocat (Collectif d’avocat-e-s, Lausanne), membre de Solidarité Sans Frontières (SOSF, Berne), de SOS Asile Vaud (Lausanne) et du Comité vaudois de soutien aux sans-papiers (Lausanne)

11h45-12h30: Discussion

Pause repas: Restaurant des Savoises (Maison des Associations)*

Après-midi: Moment d’échanges réservé aux membres du CCSI sur l’évolution des relations entre l’État et le CCSI

16h30: Clôture de la journée

*Si vous souhaitez manger à midi, merci de vous inscrire (admin@ccsi.ch) et d’indiquer votre préférence : menu végétarien ou normal


Exposition ODAE | Permis F : admission provisoire ou exclusion durable ?

Photographies, témoignages et courts-métrages présentée par l’Observatoire romand du droit d’asile et des étrangers (ODAE)

Du 9 au 18 octobre

Rond-point de Plainpalais

Vernissage le 9 octobre à 17h30

On ne peut pas construire son futur ni se projeter avec le permis F, il faut se battre pour trouver sa place (M., admise provisoire depuis 2005).

Qui sont les gens qui doivent vivre avec le statut de l’admission provisoire (permis F) ?
Comment vit-on au quotidien avec ce statut ?
Quelles sont les restrictions et leurs conséquences sur le plan humain, alors que l’admission provisoire dure souvent plusieurs années, voire indéfiniment ?
À partir de témoignages et de cas concrets, l’ODAE romand tente de répondre à ces questions en récits et en images.

Entrée libre

Projections en continu