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Opération Papyrus – un bilan porteur d’espoir

Publié le 21 février, 2020 dans ,

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Trois ans jour pour jour après le lancement public de l’opération Papyrus, le Conseil d’État a tiré le 21 février 2020 un bilan final de ce projet pilote. Le bilan officiel est excellent (vous trouverez tous les documents de la conférence de presse officielle, ainsi que le rapport d’évaluation indépendant, en suivant ce lien) et ouvre la voie à un traitement plus juste et plus humain de la problématique des sans-papiers à l’avenir. Ci-dessous, nous reproduisons le communiqué de presse des associations et syndicats partenaires (CCSI, Collectif de soutien aux sans-papiers de Genève, CSP, Caritas et EPER, ainsi que les syndicats SIT et Unia), qui ont joué un rôle clé tant dans la préparation que dans la mise en œuvre de l’opération (pour voir le communiqué en version PDF, cliquez ici):

Les associations et syndicats membres du Collectif de soutien aux sans-papiers de Genève tirent un bilan très positif de l’opération Papyrus. Impliqués dès les premières étapes dans l’élaboration de ce projet pilote visant à régulariser un nombre important de personnes et de familles sans statut légal vivant et travaillant depuis de nombreuses années à Genève, ces partenaires de terrain ont joué un rôle clé dans la mise en œuvre de l’opération. S’appuyant sur un dispositif de permanences mises sur pied spécifiquement pour l’opération, les associations et syndicats ont assuré plus de 2230 heures d’informations et de conseils professionnels, confidentiels et gratuits aux personnes directement concernées par cette opération, et ont organisé et animé une vingtaine de séances d’information publiques. Les partenaires associatifs et syndicaux ont déposé 1264 dossiers (correspondant à 1931 personnes) entre le 17 février 2017 et le 31 décembre 2018, soit les deux tiers des demandes déposées dans le cadre du projet.

Les personnes régularisées dans le cadre de l’opération Papyrus peuvent désormais construire leur avenir à Genève sereinement, en bénéficiant de leurs droits et en s’acquittant de leurs devoirs comme tous les autres résidents de ce canton. Avec l’obtention d’un permis, elles peuvent entamer des formations, sortir des situations d’exploitation au travail et trouver des emplois plus stables, conclure un bail à leur nom et éviter ainsi les sous-locations précaires et les loyers prohibitifs, ou encore défendre leurs droits lorsqu’elles sont victimes d’un délit sans craindre d’être dénoncées et expulsées.

La mise en œuvre de l’opération Papyrus a reposé sur une collaboration très étroite non seulement entre les associations, mais également avec les différents services de l’administration cantonale ainsi qu’avec les autorités politiques. C’est aussi grâce au dialogue constant et à l’état d’esprit constructif dont l’ensemble des acteurs concernés ont fait preuve que l’opération Papyrus a pu se déployer avec succès. Cette manière de travailler fait partie des « bonnes pratiques » expérimentées dans le cadre de ce projet pilote, et mériterait d’être conservée et étendue à d’autres domaines.

Parmi les éléments positifs de l’opération, nous relevons les points suivants :

  • La procédure simplifiée, basée sur des critères objectifs et transparents, nous a permis de conseiller de manière adéquate les personnes qui se sont adressées à nous et de les rassurer quant à l’issue de leur demande. Cet élément est fondamental pour construire la confiance et garantir la sécurité juridique de la procédure. Le très faible nombre de refus (inférieur à 1% des demandes) démontre à la fois que la procédure Papyrus fonctionne et que les associations et syndicats partenaires ont effectué le travail de préparation des dossiers avec sérieux.
  • La possibilité de déposer une demande sans devoir bénéficier du soutien de son employeur a permis de ne pas exclure de l’opération celles et ceux qui avaient le plus besoin d’accéder à un statut légal afin de défendre leurs droits et de sortir des situations d’exploitation dans lesquelles ils/elles se trouvaient.
  • L’opération Papyrus a encouragé de très nombreuses personnes à s’adresser aux associations et aux syndicats partenaires pour faire part de leur situation. Ces personnes, qui n’avaient parfois jamais eu de contact avec le réseau associatif auparavant, ont contribué à faire la lumière sur de nombreuses situations d’abus dont elles étaient victimes – dans le domaine du travail, du logement, ou d’autres formes d’exploitation. Ainsi, même si toutes n’ont pas pu régulariser leur situation, elles ont trouvé du soutien dans les démarches pour défendre leurs droits.
  • Dans le courant de l’opération, nous avons pu constater une prise de conscience progressive de la part des employeurs dans l’économie domestique quant à leurs obligations en tant qu’employeurs. Cette meilleure compréhension de leur rôle en tant qu’employeur, couplée aux démarches entreprises avec l’aide des syndicats afin de récupérer parfois de très importants arriérés de salaire, entraîne une amélioration des conditions de travail pour de nombreuses personnes actives dans ce secteur, qu’elles soient régularisées ou non.

Les principales difficultés rencontrées sont liées au fait que certaines personnes sans statut légal, pourtant parfois très bien intégrées et présentes depuis longtemps à Genève, n’ont pas pu régulariser leur situation dans le cadre de cette opération. En effet, les critères demeurant stricts et la base légale (art. 30 LEtr) pour les régularisations excluant par définition les personnes relevant du domaine de l’asile, nous avons dû déconseiller à de nombreuses personnes de déposer une demande. Déçues, une partie d’entre elles se sont alors tournées vers des mandataires privés ou vers d’autres intermédiaires qui ont exploité de manière éhontée ce désespoir. Faisant miroiter une possibilité de sortir de la clandestinité, certains de ces mandataires privés ont déposé (souvent pour un prix très élevé) des demandes pour des personnes qui ne remplissaient pas les critères, exposant ainsi ces dernières à un risque d’expulsion.

Nous considérons que l’opération Papyrus constitue une expérience très positive, qui démontre qu’il est possible de mettre en œuvre une politique de régularisation plus simple et plus juste, sans entraîner de conséquences négatives pour la collectivité. Ce projet a également permis de mettre fin à une certaine hypocrisie, et de reconnaître la présence et l’apport d’une population sans statut légal vivant et travaillant à Genève depuis de nombreuses années. La problématique n’étant bien sûr pas réglée de manière définitive, les associations et syndicats estiment qu’il est nécessaire de maintenir une telle procédure afin de tenir compte de cette réalité et de permettre aux personnes concernées de régulariser leur situation. Nous espérons également que l’expérience menée à Genève donne confiance à d’autres cantons, pour que les personnes qui y vivent dans une situation similaire puissent également de sortir de la clandestinité.

Les associations et syndicats membres du Collectif de soutien aux sans-papiers continuent de s’engager pour défendre les droits et améliorer les conditions de vie et de travail de toutes les personnes sans statut légal qui s’adressent à nos organisations, qu’elles aient ou non des chances de régulariser leur situation.