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Non à la loi Frontex le 15 mai 2022!

Publié le 21 mars, 2022 dans , ,

Le CCSI a soutenu le référendum contre la participation de la Suisse à l’agence européenne des gardes-frontières Frontex. Ce dernier ayant abouti grâce à la très forte mobilisation des militants et militantes, et des personnes migrantes qui se sont organisées pour défendre leurs droits, l’objet est soumis au vote le 15 mai prochain. Le CCSI appelle à voter NON sur cet objet, et reproduit ci-dessous le communiqué de presse Comité unitaire genevois No Frontex, daté du 21 mars 2022. 

Devant la persécution, toute personne a le droit de chercher asile et de bénéficier de l’asile en d’autres pays
(article 14 de la Déclaration universelle des droits de l’homme, 1948)

À l’heure où l’Union européenne ouvre ses bras de façon inédite aux Ukrainiennes et Ukrainiens fuyant la guerre, il serait temps de questionner le traitement qu’elle inflige depuis plusieurs années aux personnes fuyant d’autres conflits, les régimes répressifs et la misère. Violations des droits fondamentaux, morts en mer comme sur terre, refoulements pourtant prohibés par le droit international : Frontex, l’Agence européenne des garde-frontières et garde-côtes européens est témoin voire complice de ces actes et doit en répondre. Or, l’augmentation prévue du financement et de la dotation en personnel de Frontex par la Suisse se fait sans aucune revendication quant à un contrôle démocratique du respect des droits humains par cette agence. Nous refusons de donner un blanc-seing à une agence violant impunément les droits fondamentaux de personnes qui cherchent protection. C’est pourquoi nous appelons à voter non le 15 mai 2022.

Frontex, complice des violations des droits de l’homme

Frontex est l’agence de protection des frontières de l’Union européenne. Fondée en 2005, elle a connu depuis une croissance exponentielle, avec une armée de gardes-frontières et un énorme arsenal de matériel d’intervention. Orchestrant la politique européenne de défense contre l’immigration d’une manière violente et répressive, elle est l’instrument d’une Europe qui se barricade, qui brutalise et qui rejette : nous ne voulons pas de cette Europe-là !

Les personnes en exil en témoignent depuis des années : Frontex est complice des violations des droits de l’homme. Le long de la route des Balkans, Frontex participe à des « pushbacks[1]» illégaux. En mer Méditerranée, Frontex est présente lorsque les garde-côtes nationaux détruisent les moteurs des bateaux et abandonnent en mer les personnes en quête de refuge. Qui plus est, Frontex coopère systématiquement avec les garde-côtes libyens[2] qui interceptent d’innombrables bateaux et les renvoient de force en Libye, où les personnes migrantes sont détenues dans des conditions de violences extrêmes.

La politique de cloisonnement de l’UE a coûté la vie à plus de 44’000 personnes depuis 1993, et bien davantage encore si l’on tient compte des cas non déclarés. Dans les pays européens et notamment la Suisse, Frontex planifie et réalise des renvois pour expulser les personnes migrantes. Ces « vols spéciaux » sont lourdement encadrés par des policiers, les personnes migrantes sont entravées, parfois menottées et cagoulées. Le respect de la santé des personnes n’est pas garanti, y compris lorsque des femmes enceintes sont déportées. Incontestablement, Frontex se voit confier les missions répressives et militaires de la gestion des migrations vers l’Europe.

Financer une armée : c’est NON!

Le mandat de Frontex a successivement été étendu en 2007, 2011 et 2019. Son budget a littéralement explosé, passant de 6 millions en 2005 à 11 milliards d’euros prévus pour la période 2021- 2027. L’arsenal de l’infrastructure militaire ne cesse de croître : l’agence dispose de ses propres véhicules d’intervention, de bateaux et de drones et équipera à l’avenir son armée stationnaire permanente de ses propres armes. Quant à son personnel, la force opérationnelle de Frontex doit être augmentée d’ici 2027 pour devenir une armée permanente indépendante comptant 10’000 garde-frontières et garde-côtes.

Alors que Frontex était en pleine tourmente dans le cadre de plusieurs enquêtes menées par des instances externes portant à la fois sur des violations des droits humains, mais aussi sur sa gestion, poussant le Parlement européen à décréter un gel d’une partie de son budget, en Suisse, l’Assemblée fédérale acceptait d’augmenter de 24 à 61 millions de francs par an sa participation financière d’ici 2027, sans demander de garantie en matière de respect des droits fondamentaux, et ce malgré la demande de la gauche.

Le 15 mai : refusons d’augmenter le soutien financier de la Suisse à Frontex !

Un référendum a heureusement abouti contre cette décision du Parlement. Aujourd’hui, une large alliance de collectifs de base, d’organisations, de partis, de syndicats et d’organismes religieux s’engage en faveur d’un NON le 15 mai.

La Suisse devrait conditionner toute participation à un véritable monitoring externe du respect des droits humains par Frontex et à des couloirs humanitaires sûrs. Dire a posteriori, comme le fait le Conseil fédéral, qu’on peut changer les choses de l’intérieur ne peut être pris au sérieux : la Suisse participe déjà à l’architecture de la politique européenne des frontières extérieures, sans avoir élevé la voix sur les agissements de Frontex. Seul un signal fort, comme un non le 15 mai, peut ouvrir un débat actuellement absent au niveau européen.

Clause guillotine et exclusion de Schengen ? Le refus en votation de l’augmentation de la participation de la Suisse à Frontex induirait une exclusion automatique de Schengen, selon les autorités fédérales. Un refus obligera d’abord les parlementaires suisses à se remettre au travail pour proposer au peuple des mesures d’accompagnement humanitaires et un contrôle démocratique de Frontex plaçant le respect des droits humains comme condition sine qua non à la participation de la Suisse.

Aujourd’hui plus que jamais, l’Europe a besoin d’être unie, de défendre des valeurs démocratiques, de respect des valeurs fondamentales que sont le droit à la vie et les libertés de chacune et chacun. Par ses actes, Frontex est une négation de ces valeurs.

Pour un véritable accueil, dans la dignité, des personnes en exil !

Au lieu d’assurer des voies de fuite sûres et nécessaires, Frontex mène une véritable guerre contre la migration. Des milliers de personnes en meurent. Surtout, cette brutalité entrave l’accès à une protection pour les personnes qui demandent l’asile. Cela aggrave fortement l’insécurité et les violences sur les chemins de l’exil, conduisant parfois, dans le cas des violences sexuelles par exemple, au constat de sévices systématiques[3].

  • La gestion des frontières de l’espace Schengen par Frontex engendre continuellement des violations des droits fondamentaux. Plutôt que dépenser des millions pour soutenir Frontex, nous exigeons de financer un accueil digne et humain de toutes les personnes migrantes en
  • En l’absence de voies légales pour entrer dans l’UE, puis sur le territoire suisse, les personnes en exil sont contraint·e·s de contourner les contrôles douaniers et se mettent en danger. Plutôt que de soutenir une armée aux frontières, nous demandons des couloirs sécurisés d’accueil pour les personnes en exil, par la mer comme par la terre !
  • Frontex illustre une Europe militaire, brutale et répressive. Plutôt que cette réalité dégradante de l’Europe, nous réclamons une Europe ouverte, féministe[4] et accueillante !

Le 15 mai 2022, votons NON à Frontex (objet fédéral n°3) !

[1] Terme courant pour désigner le processus violent par lequel les personnes fuyant leur pays se voient refuser le droit à  la   liberté de mouvement et à l’asile.

[2] The New Humanitarian, The European approach to stopping Libya migration, 17, 11,21

[3] Le Courrier, Routes migratoires jonchées d’abus, interview de Médecins sans frontières, 7 mars 2022

[4] Voir : https://feministasylum.org/